Made in China : Baya, un hymne à la vie


Paradoxal de titrer « un hymne à la vie » pour un film ponctué par la mort de plusieurs personnes. Et pourtant, la cinéaste chinoise Ji DAN nous offre avec son documentaire Baya une œuvre vivifiante.

Baya, une force de la nature

La cinéaste a accompagné sur plusieurs mois, Baya, une femme âgée (une « grand-mère »). Elle vit en Chine dans un village du district de Du’an (都安县), perdu dans les montagnes du Guangxi. Pendant le film, Baya évoque sa famille et tout particulièrement ses sept fils, victimes les uns après les autres de la maladie de la mine, une pneumoconiose.

Mais Baya est une force de résilience et de vie, force qui est magnifiée par les images de Ji Dan. La cinéaste filme patiemment Baya dans son environnement naturel. Le film alterne les plans fixes relativement larges qui laissent au spectateur le temps d’intégrer les gestes de Baya et les travellings. Ji Dan suit alors la vieille dame dans ses longues et pénibles pérégrinations sur le flanc de la montagne. Par sa position basse, la caméra fait corps avec Baya et la relie à la terre. La bande son constituée d’ambiances : cris des animaux, bruits de la machette, grondements de tonnerre accentue cette impression de cocon végétal.

Le bois de la vie

La principale activité de Baya est de ramasser et couper du bois. C’est aussi sa grande inquiétude : ne pas avoir assez de bois pour alimenter le feu. Ce feu qui permet de se chauffer et de préparer la nourriture. C’est d’ailleurs souvent auprès du feu que Ji Dan filme Baya et recueille ses souvenirs. Comme le feu qui permet la vie, comme le bois qui assure sa conservation, Baya a donné la vie et se bat pour la maintenir en protégeant ses enfants et petits-enfants. Elle est d’une force incroyable comme lorsqu’elle descend les lourds fagots de la montagne. Une force physique et une force mentale qui ont marqué la cinéaste. « Au cours de l’année et des huit mois que j’ai passé avec Baya, j’ai subi une transformation sans le savoir. Non seulement mon corps est devenu plus fort, mais mon moi intérieur est également devenu plus ouvert et plus libre», précise Ji DAN présente à la projection.

Ne pas se résigner

Le film vit au rythme de la nature. Il dure (parfois trop) comme s’éternise l’agonie du petit-fils de Baya, qui perd petit à petit ses forces. La vie dans cette contrée chinoise reste très difficile. Peu de solution pour survivre sinon d’aller travailler au risque de sa vie. Malgré son désaccord, tous les fils de Baya iront embaucher à la mine et en mourront. Les quelques sous récoltés en valaient-ils la peine ? Baya s’interroge mais refuse la fatalité. C’est la société qui ne laisse aux pauvres qu’une seule solution : «  se tuer au travail ».

Baya constate cette réalité mais n’est pas résignée. Elle continue à se battre, à travailler pour protéger et nourrir celles qui restent : la femme de son petit-fils et ses deux filles. Comme Baya, elles vivent au plus près de la nature et doivent, dès que possible, participer à la lutte pour la vie : ramasser le bois et récolter le maïs.

Auront-elles une vie meilleure ? Vers la fin du documentaire, un plan magnifique nous donne espoir : Ji Dan filme la maison de Baya soudainement transformée par une éclaircie dans le ciel brumeux. La nature reprend vie.

Le film a été projeté au Cinéma Arvor à Rennes dans le cadre du festival Made in China.

Biographie de Ji Dan

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